Tuesday, December 25, 2007

Ojalá que llueva café en el campo, que caiga un aguacero de yuca y té (Juan Luis Guerra - Ojalá que llueva café en el campo)

Le vrai plaisir dans la région de l'Eje Cafetero, c'est de partir se balader en voiture. Les routes sont belles et les distances sont courtes, une vraie exception en Colombie.

Hier on est allés à Cartago, à une vingtaine de kilomètres de La Virginia dans la Vallée du fleuve Cauca (l'un des et non plus dans la vallée du Risaralda. Un petit bout de route, et pourtant on a déjà changé de département. Bah oui, ça paraît banal en France, mais pas ici!! C'est tout ce que je connais du département du Valle del Cauca pour l'instant, mais je ne désespère pas de connaître un jour "La sucursal del Cielo"... Cali, la capitale du département. En attendant, Cartago est une jolie petite ville d'un peu plus de 100.000 habitants. Elle est connue pour son artisanat de broderies à la main de motifs floraux et géométriques, vendues par des petites entreprises familiales traditionnelles à travers tout le pays.

Et le jour de Noël on en a profité pour aller au Parque Nacional del Café. Pour y aller, on a pris la jolie petite route qui passe par Quimbaya et Montenegro. Le Parque Nacional del Café, c'est une sorte de Disneyland du café au coeur de la région de l'Eje Cafetero. Il a été fondé par la puissante "Federación Nacional de Cafeteros de Colombia" en 1995 et s'étend sur 13 hectares d'une ancienne finca. Une partie du parc est du style fête foraine, une autre plus familiale comporte téléphérique, petit train et shows sur le thème du café, et enfin la troisième présente en détail toute la culture (culture et Culture) du café. On a choisi l'option intermédiaire par flemme de se taper le sentier de découverte du café sous la pluie battante, mais j'y retournerai juste pour ça!



A différents endroits sont présentés des véhicules restaurés utilisés d'antant dans la région par les cafetiers et les pompiers de la région (comme la pimpante American LaFrance Brockway Torpedo, qui n'a de française que le nom et piquait des pointes à... 40km/h à faire paniquer les bonnes dames en 1924).



En contrebas du téléphérique, un petit village typique du Quindío avec ses fenêtres bariolées a été recréé, avec son église, sa gare, sa station de pompiers et ses maisons, toutes des reproductions exactes de maisons d'Armenia, la capitale du département, et de la région. Chaque maison est un musée, une boutique ou un restaurant, mais bien camouflés, une subtilité rare dans les sites touristiques du pays. Malgré l'aspect "parc d'attraction', il faut reconnaître qu'il y a un bel effort de restauration et de présentation.




Au détour des sentiers on croise les artistes du parc en répétition ou en pause. El arriero, typique de toute la région de l'Eje Cafetero et d'Antioquia, qui n'a oublié aucun de ses accessoires traditionnel: sa mule, évidemment, les espadrilles, le poncho, le chapeau, la machette, le carriel - sac de cuir à compartiments très particulier et exclusivement masculin (n'en déplaise à Môman qui les adore) pour transporter l'argent, le couteau, le rasoir, le peigne, le briquet, les dés, le jeu de cartes, la mèche de cheveux de la fiancée, l'amulette, le chapelet, le tabac, le sifflet, etc, etc, etc...




Les shows du parc sont un peu cul-cul la praline, pas terribles, mais en intro du show de danse, deux danseurs jouent une jolie petite scène de démonstration d'une danse des machettes typique du Quindío:



Le Parc a une superficie impressionnante de forêts de guadua et de cafetiers - por supuesto. Un petit tour et la nuit commence déjà à tomber. Hop, on remonte et on repart vers la finca en suivant les jeep chargées d'ouvriers agricoles qui zigzaguent dans la montagne.




Et voilà! Le lendemain mercredi, je repars de Pereira à Bogota... en bus! Donc 8 bonnes heures de trajet. Tout ça pour un entretien à Bogota le jeudi matin. Et jeudi après-midi, hop! Dans le bus pour Cartagena, rien que 24h de trajet. Oui, c'est bien ça, 32h de car dans la tronche en moins de 48h. Autant dire que le reste des vacances à Cartagena ça a été repos et flemmardise... et retour en avion, siouplé, parce que je l'avais bien mérité!!

Monday, December 24, 2007

Tú que estás lejos de tus amigos, de tu tierra y de tu hogar... en nuestra mesa, para tí tengo un lugar (Voz Veis - Ven a mi casa esta Navidad)

Dans le bestiaire de la finca, il y a les chiennes: Luna, la dalmatienne qui adore se dorer au soleil au milieu des fruits et légumes (les provisions de banane, banane plantain, zapote, yuca, et haricots pour la semaine), du coup Calu doit lui mettre de la crème solaire sur la truffe tous les jours, et Miel, spécialiste des tours du propriétaire à 200km/h.



Et puis il y a aussi les insectes, sympas ou pas, mais en tous cas tous surdimensionnés. Surtout les guêpes, d'une espèce comme j'en ai jamais vu en France, toutes noires avec la tête rouge, et énormes. Le papa de Calu tente tous les jours de les enfumer un peu mais refuse de les tuer, et le principal résultat jusqu'ici, c'est qu'elles s'affolent, rentrent dans la maison par le grillage sous la tôle du toit... et piquent l'invitée (c'est-à-dire moi!), puis reviennent tranquillement au nid au cours de l'après-midi... On n'arrivera à s'en débarrasser définitivement qu'après une conspiration entre Calu, sa maman et son cousin, qui finit par brûler complètement le nid un matin où la papa est absent. Pfiiouuuu...



En Colombie, les fruits et légumes aussi sont surdimensionnés. Les poireaux font le triple des français, les concombres font le double 20 jours seulement après avoir été plantés... Et voici une belle papaye pour le petit-déjeuner de la famille:

Et d'ailleurs à propos de bouffe, ce qui est typique de Noël en Colombie, et surtout dans cette région, c'est de préparer des "buñuelos" acompagnés de "natilla". La natilla, c'est une sorte de flan, autant dire que ça n'enchante pas votre humble rédactrice. Mais les buñuelos par contre, c'est délicieux. De la farine spéciale, dont tous les supermarchés regorgent pendant le mois de décembre, un peu d'eau, du bon fromage frais, et hop! Dans la friteuse! Et le mieux c'est qu'il n'y a pas besoin de les retourner parce que leur texture parfaite les fait rouler tout seuls dans l'huile au fur et à mesure de la cuisson. Très marrant à regarder car on dirait qu'ils sont dotés de vie dans la friteuse, hahaha! Enfin, disons que c'est ce que ça donne quand on a des années d'expérience, car des amies m'ont confié aboutir plutôt à des chous-fleur ou autres météorites pour cause d'explosion dans l'huile de beignets mal équilibrés ou mal pétris ;-) Quand la cuisinière prépare les buñuelos, en tous cas, la famille est aux aguets et tourne autour de la cuisine. C'est bien simple, à aucun moment je n'ai vu plus d'une dizaine de buñuelos dans l'assiette, vu qu'on est tous passés en piquer quelques uns à un moment ou à un autre, hahaha!!! Heureusement la cuisinière est compréhensive, et puis c'est meilleur bien chaud ;-)




Moi je ne suis pas restée les bras croisés: ces jours-ci j'ai préparé une tarte aux fruits qui a eu tellement de succès que j'ai été invitée à la refaire le lendemain, dans l'immense cuisine aménagée de la tante, sur un plan de travail trônant au centre de la cuisine avec les élèves cuisinières autour de moi, comme dans les émissions de cuisine, hahaha!!!

Le soir de Noël, tout le petit monde se retrouve à El Establo: le frère ainé de Calu, la petite soeur Nelvi et son mari Beto, la tante et la grand-tante.





Un réveillon bien chaleureux, et la famille m'a même fait plein de cadeaux, tan lindos!

Sunday, December 23, 2007

Tanta yuca buena que se come en la provincia (Carlos Vives - El hambre del liceo)

Aujourd'hui c'est programme travaux des champs! Enfin plutôt inspection des travaux finis parce que bon, quand on est rat des villes on sert pas à grand chose au milieu des ouvriers agricoles à la peau tannée par le soleil ;-) Les parents de Calu et Nelvi sont les seuls de la famille à avoir encore des champs cultivés et à n'avoir pas transformé leur terrain en "finca" de villégiature. Et on est en plein dans l'époque de la récolte de la yuca.

La yuca n'est pas très connue en Europe, pourtant avec son cousin le manioc ils constituent la 3e source de glucides au monde. La yuca est bien sûr une racine, mais moins filandreuse et plus farineuse que le manioc, avec un goût plus doux. Elle pousse en arbustes d'environ 2m avec des petites feuilles et des branches de rien du tout... du moins à vue d'oeil! Et comme ici tout pousse, il n'y a pas moins de 4 récoltes par an, souvent alternées avec le maïs pour permettre à la terre de se reposer. La yuca est un élément essentiel de la gastronomie colombienne, et remplace presque la pomme de terre dans certaines régions. Elle est utilisée sous forme de farine, ou bouillie dans de délicieuses soupes, ou encore frite. Signe culturel qui ne trompe pas: au rayon des surgelés d'un supermarché colombien ou bien dans les fast food, on trouve autant de frites style Mc Cain que de "yuca a la francesa", tout aussi populaire!

Nous voilà donc chaussées de bottes en plastique à écouter les explications du cousin de Calu - casquette blanche - qui contrôle la récolte pour le compte du propriétaire (le père de Calu) et du contremaître -casquette marron - qui embauche et dirige les ouvriers. Le ciel paraît couvert mais qu'on ne s'y trompe pas: il fait chaud et le soleil tape très fort. Les ouvriers sont à l'oeuvre et se divisent à peu près le travail.



Première étape: couper l'arbuste à la machette et arracher les racines. Ouais, comme si c'était facile!!!! Les yucas sont plantées par deux, de façon à ce que les troncs des arbustes poussent enforme de Y et que les racines soient plus faciles à arracher (une branche dans chaque main et on tire). J'ai fait la tentative pour vous cher lecteur et je vous annonce que... le tronc n'a même pas frémi d'un millimètre alors que j'étais arquée à 90° en arrière en tirant de toutes les forces de mes petits bras de citadine. Les ouvriers, quant à eux, arrachent ça facile, comme si c'étaient même pas planté dans la terre jusqu'à près d'1m de profondeur! Le cousin de Calu nous le confirme: parmi tous les ouvriers agricoles, les ouvriers de la yuca sont les plus robustes, et aussi les plus rudes. Il ne faut pas les chercher, car apparemment ils ont mauvais caractère et sont réputés pour leur violence, entre eux ou au sein de leur famille... Gentil le monsieur, hein? On va vous les laisser alors, les arbustes...



Deuxième étape: virer les arbustes coupés et préparer les racines. Un coup de machette par ci, un coup de machette par là et hop: voilà la yuca telle qu'on la trouve en bout de chaîne. En effet, on achète toujours la yuca avec son écorce encore pleine de terre humide, et à la maison on leur enlève leur enveloppe d'1 bon mm d'épaisseur avant de les rincer et de les cuisiner (ou de les congeler).



Troisième étape: certains ouvrier plus qualifiés et rompus que les autres se chargent de les mettre en sacs. Car c'est une affaire compliquée. Il faut d'abord couper un bout de la racine pour voir l'intérieur. S'il y a un petit point jaune, pas de bol, la racine n'est pas au top de sa forme. Aucun danger pour la consommation, mais ce sont des racines qui sont infectées par un petit champignon et donc elles ne peuvent pas ête vendues au prix fort. Elles seront écoulées sur les marchés locaux à plus bas prix, ou une petite partie sera donnée aux ouvriers comme paiement en nature (pour ainsi éviter qu'ils en piquent en douce). Les racines d'un blanc immaculé sont de bonne qualité, mais encore faut-il qu'elles aient le bon calibre: ni trop grandes, ni trop petites, et aussi la bonne couleur: la peau pas trop orangée, et bien lisse. L'ouvrier remplit alors les sacs avec les yucas top modèles, jusqu'à un poids de 25kg. Autant le calibrage que le remplissage des sacs se font par pur soupesage à la main, et l'expérience et la concentration de l'ouvrier sont déterminantes à cette étape.





Quatrième étape: le représentant du propriétaire vérifie le poids des sacs avec chaque ouvrier, individuellement. C'est important, autant pour savoir exactement le poids qui est envoyé au grossiste que pour évaluer la qualité du travail de l'ouvrier expérimenté. Bien que toute l'étape 3 aient été faite à la main, 80% des sacs font exactement 25kg, pas un de plus, pas un de moins!



Cinquième étape: les ouvriers apportent les sacs à la jeep, el "jipao" comme on dit en Colombie. Ces petites jeep qui n'ont l'air de rien sont en fait des monstres de mécanique. Ils sont capables de démarrer dans un sentier plein de boue et chargés de la récolte de tout un champ. Dans la région on leur voue un véritable culte, en organisant des festivals et des démonstrations de démarrage sur les 2 roues arrière (ce qui est très fréquent en utilisation réelle, à cause du poids du chargement qui fait basculer le véhicule). Les ouvriers arrivent, portant chacun 2 ou 3 sacs, qui, je le rappelle, font 25kg chacun!!!



Et hop, la jeep est savamment chargée, des sacs dans un sens puis dans l'autre, sur les côtés et sur le toit pour équilibrer, et enfin on fait passer une corde pour saucissonner le tout et qu'aucun sac ne tombe en cours de route.



Et puis ça y est! Tout est chargé et la jeep démarre sans aucun problème, direction le grossiste à Manizales, et au bout de la chaîne les consommateurs que nous sommes!

Saturday, December 22, 2007

Allons z'à la campagne et oublions Paris; cherchons à la campagne le vrai sens de la vie (Kent - Allons z'à la campagne)

Noël approche, il est temps d'aller à la finca. La "finca", en Colombie, ça veut dire plein de choses. Au départ c'est une ferme, avec des terrains autour, l'équivalent de la "hacienda". Selon les régions, ce genre de ferme porte des noms différents: par exemple "el hato" dans les Llanos Orientales. Le sens qui m'a le plus interloqué, c'est "finca raíz", qui n'a rien d'une ferme avec des racines, hahaha, mais qui est tout simplement un bien immobilier, quel qu'il soit.

Mais pour la plupart des colombiens, la finca, c'est un terme générique pour désigner la maison de campagne, et on y accède après quelques heures de route en "tierra caliente". Attention, j'ai bien dit générique. Car cela va de la petite maison de campagne sans eau ni électricité... à la finca façon narcotrafiquant à son apogée, avec piscine et jacuzzi, sols en marbre, écuries, piste d'hélicoptère voire hippopotames, en passant par la maison de campagne plus ou moins cossue... Les "mauvaises" langues disent qu'en instaurant la politique de "sécurité démocratique", qui a considérablement sécurisé le transport terrestre en Colombie, le président Uribe s'est surtout assuré le soutien de tous les nantis peuvent maintenant profiter tranquillement de leurs week-ends prolongés; en tout état de cause, des milliers de colombiens se ruent sur les routes à chacun des (nombreux) ponts, pour aller se détendre à la finca. Quelques belles fincas "maisons de campagne", et une agricole:




Nous voilà donc en route pour la finca des parents de mes amis, aussi humble et sympathique que ses occupants. La route est magnifique; la région du café, c'est la Suisse de la Colombie. Parce que c'est une région beaucoup plus riche, industrielle, moderne, tranquille et bien entretenue que le reste de la Colombie, mais aussi par ses paysages vallonés entre les Cordillères Occidentale et Centrale.




Ici et là, au milieu des cultures de café à perte de vue, des fincas cafeteras traditionnelles, avec leur porche peint de couleurs vives et fleuri d'orchidées suspendues. Au fond des vallées, on remarque de temps en temps d'énormes bambous les pieds dans un ruisseau. C'est la "guadua", qui sert à toutes sortes de constructions dans la région, et même à faire des meubles ou toute sorte d'objets.


A peine un peu plus d'une heure et demi de route et on arrive. Dans l'Eje Cafetero, les distances sont courtes, et c'est vraiment un plaisir dans un pays où 100km n'est jamais égal à 1h de trajet. Comme je vous le disais, la finca de mes amis est toute simple et bien tenue. Elle s'appelle "El Establo" parce que c'était, et c'est encore une étable, avec des barraquements attenants transformés en petite maison. Le chemin n'est qu'en partie empierré, et on manque de s'embourber dans l'allée, mais Clemen a l'habitude et elle nous sort de là avec une maneouvre de pilote de F1. L'intérieur de la maison est d'un confort simple, avec peu de décorations hormis la machette, le chapeau et le poncho paisa (attention, le "poncho" en Colombie n'est pas ce qu'on appelle un "poncho" en France, souvenez-vous de Juan Valdez...). Comme dans beaucoup de foyers en Colombie, c'est la chaleur humaine qui fait tout. Et puis chez les paisas, on travaille dur et on ne flambe pas... sauf qu'en on passe du côté obscur de la Force....



Et puis je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager ma passion photographique pour l'arbre tutélaire de l'Establo, que j'ai passé des heures à regarder pendant mon séjour, hehehe...